Les libraires à l'honneur : Eloïse
-
Alors que nous discutions du travail en librairie, une amie auteure a constaté que, très souvent, les auteurs méconnaissaient le travail du libraire alors qu'il est celui grâce à qui leurs
livres seront diffusés et vivront auprès des lecteurs.
Pour remédier à ça, je vous propose des interviews de libraires où ils nous raconteront leur parcours, nous parleront de leur travail au quotidien, nous raconteront leurs coups de cœur...
La première volontaire s'appelle Éloïse et s'occupe des rayons Jeunesse et Parascolaire dans la librairie d'une grande surface.
Gertrude : Bonjour ! Présente-toi en quelques lignes : comment es-tu devenu(e) libraire ? Quel a été ton parcours ?
Éloïse : J’ai travaillé en job d’été au centre de l’imaginaire arthurien qui a une librairie dans son espace d’exposition, spécialisée sur les légendes arthuriennes. Ça m’avait
beaucoup plu, d’autant que j’ai toujours été attirée par et le monde du livre et les légendes arthuriennes, les contes... On travaillait beaucoup de beaux-livres de photos : Irlande, écosse, ou
sur les fées.
Je faisais alors des études d’art du spectacle dans le but de devenir responsable de communication en théâtre (c’est lui qui fait le lien entre artistes et public, assure la promotion, prépare
les programmes, etc.). Le milieu du théâtre étant très fermé, j’ai décidé de m’orienter sur autre chose : je travaillais alors dans une école comme assistante d’éducation : pourquoi ne pas tenter
le concours ? Mais j’ai échoué et j’ai voulu me réorienter. Je me suis souvenue du plaisir pris au centre de l’imaginaire. J’ai donc cherché une formation en rapport avec le livre. Une première
formation axée surtout sur l’orientation m’a convaincue et j’ai commencé la formation PROFIILE en CAP Vente option Librairie-Presse- Papeterie.
G. : Présente-nous ta librairie / ton rayon en quelques lignes... [ville, surface, rayons principaux, public ; particularités]
E. : La ville est de taille moyenne, assez touristique : en été il y a une hausse de fréquentation. Le public est assez âgé. Le panier moyen est plutôt important (15 à 20€ en moyenne). L’activité
touristique influe sur l’activité de la grande surface : on remarque un public étranger en hausse, anglophone et allemand, depuis le mois de juillet.
Nous avons donc un rayon de livres en anglais ainsi qu’un rayon sur la région et son histoire qui marchent bien.
Dans mon rayon : la jeunesse, je dois suivre la documentation et les romans sur l’histoire de la région, notamment la Seconde Guerre Mondiale.
G. : Comment as-tu découvert la littérature jeunesse ?
E. : Dans ma jeunesse ! (rires) Je suis une lectrice de romans, et je viens d’une famille très littéraire ; on m’a encouragée à écrire. Tous les mercredis on allait à la bibliothèque, ce qui m’a
permis de découvrir beaucoup d’auteurs.
G. : Comment as-tu découvert la gestion du rayon jeunesse ?
E. : Au cours de ma précédente mission (durant deux mois), mon travail consistait à être une « aide volante » dans tous les rayons, notamment la jeunesse où il y avait un très fort besoin en
période de Noël. J’ai fait la mise en rayon, ainsi que du conseil. Mes goûts me portant vers la jeunesse, et ayant travaillé en école, je sais cibler en fonction des âges, et je connais les goûts
des enfants aujourd’hui, même des « mauvais lecteurs » : les enfants qui n’aiment pas lire ou qui pensent être incapables de lire. Pour ces derniers, je sais trouver le sujet qui va leur
parler.
G. : Lorsqu’un représentant te parle d’un livre, y a-t-il des critères précis ? Qu’est-ce qui fait que tu n’achèteras jamais tel ou tel titre, ou qui te feront craquer sans réfléchir ?
E. : Ce qui me fait craquer : sur les albums, c’est l’illustration ! Si c’est trop pointu, ou trop « bâclé » ou copié, ça ne passera pas. Certains éditeurs copient, mal, Disney...
Il y a le bon et le mauvais représentant : le bon a travaillé ces titres, les connaît et en fait un résumé
vivant. S’il est passionné, on a envie de le suivre. Si le représentant n’est pas passionné, on va freiner sur les commandes ; je vais me fier à une seule information : le thème et choisir en
fonction des thèmes qui marchent... le fantastique pour les ados, les chevaux pour les filles et les monstres pour les garçons. Si le représentant est timide, je me montre très prudente.
Ce qui joue aussi, c’est la réputation d’un auteur : si J.K. Rowling sort un livre, on pourra en prendre 30 ou 40 d’un coup ; si c’est un jeune auteur et que le représentant n’est pas passionné,
on va hésiter car on n’aura pas de moyen de deviner ce qui va marcher.
Les ados sont très attirés par les couvertures pour les romans : si la couverture n’est pas belle, ils ne liront pas la 4e... Ils flashent sur des visuels.
Pour les albums : cela peut paraître idiot mais je fais attention à la dimension. Certains sont très beaux mais trop grands : on ne sait pas où les ranger, on n’a ni les tables ni les rayons qui
conviennent. Les clients aussi hésiteront car ils n’auront pas d’endroit où les mettre chez eux non plus. Ainsi, La mélodie des tuyaux et Blanche-Neige de Benjamin Lacombe sont très beaux mais difficiles à vendre. Ce critère peut être bloquant sauf si l’illustrateur est très, très connu...
(A suivre...)