Qui a peur de la mort de Nnedi Okorafor chez ActuSF

  • À l'ombre des nénuphars - Gertrude - Sandrinoula
  • Livres, Imaginaire

La rentrée littéraire, ce n’est pas seulement l’autofiction éplorée et les textes inspirés par l’Histoire du continent européen… Cet imposant roman nous fait partir sur le continent africain, réfléchir aux mécanismes d’un génocide et trembler pour ses personnages. Déjà paru aux éditions Éclipse (avalées depuis par Panini Books) en 2013, il est en cours d’adaptation par HBO. J’étais donc curieuse de voir s’il en valait la peine.

Présentation par la maison d’édition
Dans une Afrique post-apocalyptique, la guerre continue de faire rage. Enfant du viol, rejetée par les siens du fait de sa peau et ses cheveux couleur de sable, Onyesonwu porte en elle autant de colère que d’espoir. Seule sa mère ne semble pas étonnée lorsqu[e Onyesonwu] se met à développer les prémices d’une magie unique et puissante.
Lors de l’un de ses voyages dans le monde des esprits, elle se rend compte qu’une terrible force cherche à lui nuire. Pour en triompher, elle devra affronter son destin, sa nature, la tradition et comprendre enfin le nom que sa mère lui a donné : Qui a peur de la mort.

Lauréat du World Fantasy Award et du Prix Imaginales, Qui a peur de la mort ? est actuellement en cours d’adaptation pour HBO.
 

Qui a peur de la mort de Nnedi Okorafor chez ActuSF

Mon avis
Une fois n’est pas coutume, j’écris cette chronique quelques heures seulement après avoir terminé la lecture... Ce roman ne se lâche pas. On est emporté par la colère d’Onyesonwu, par sa puissance, et comme son amoureux fou et ses amis, on reste dans ses pas et on rêve de pouvoir l’aider dans sa mission vengeresse.

 

Avec son style très graphique, avec des descriptions de paysages, d’ambiance très réussis, l’autrice nous plonge dans un imaginaire original, onirique et sombre, où la magie s’appelle juju, où la frontière entre humain et animal n’existe pas vraiment pour certaines personnes, et où l’amour est entier. Le juju se manifeste sous des formes originales et variées, selon la culture dominante des villes traversées par Onye et ses amis au cours de leur traversée du continent, d’ouest en est, pour tenter d’aller à la source du génocide et de l’arrêter.
Onyesonwu n’est pas une héroïne solitaire, mais est entourée par de très beaux personnages dont la présence et l’amour constituent un élément déterminant dans son évolution – notre destinée n’est pas déterminée que par notre naissance et peut être infléchie… Le splendide Mwati, son amoureux dévoué, guérisseur doué et intelligence vive, et qui permet à l’autrice d’évoquer les enfants-soldats ; les amies liées à Onyesonwu depuis la cérémonie d’excision (terrifiant moment dans le livre, tout autant que les circonstances de la conception d’Onyesonwu) ; les adultes qui l’entourent et la forment à la maîtrise de ses pouvoirs ; sa mère, dont les cordes vocales ont été brisées mais qui maîtrise d’autres moyens d’expression tout aussi puissants ; le Peuple rouge, qui offre un moment d’harmonie à Onyesonwu ; les trois chameaux aussi, qui suivent leur propre volonté et proposent leurs services à Onyesonwu et sa « compagnie » simplement parce que cela n’entre pas en conflit avec leurs propres envies…
Nnedi Okorafor évoque ainsi la palette des sentiments qui lient les personnes – amour, amitié, respect – mais aussi celle de la folie humaine, qu’il s’agisse de harcèlement raciste, de l’usage du viol comme d’une arme de guerre ou de la planification d’un génocide. La colère et la volonté de vengeance colorent le début du roman et noircissent le récit de l’héroïne ; on aurait pu en rester là et justifier les actes d’une adolescente psychopathe déresponsabilisée par son histoire… mais l’intrigue est bien plus complexe. Onyesonwu est une élève douée et boit le savoir, apprend, qu’il s’agisse de maîtriser le juju, de découvrir l’histoire de sa mère ou de lutter contre ses propres penchants les plus sombres.


Un splendide roman d’initiation teinté de tragédie, qui donne envie d’aller découvrir le reste de l’œuvre de Nnedi Okorafor. À noter la postface, très émouvante, dans laquelle l’autrice explique les conséquences de l’écriture du roman.
 

À (re)lire

Kisasi, d'Aurore Perrault, éditions Griffe d'encre, chroniqué ici http://alombredesnenuphars.over-blog.com/2016/01/kisasi-d-aurore-perrault.html

Informations complémentaires
Qui a peur de la mort ? (« Who fears death ») de Nnedi Okorafor

Site de l'autrice : http://www.nnedi.com/ 
Traduction de Laurent Philibert-Caillat
Couverture : Travis DAVIDS https://www.facebook.com/pg/TravisDavidsArt/
Éditions ActuSF – distribution : Harmonia Mundi
Octobre 2017
Version papier : 16,00 €

552 pages

ISBN : 978-2-36629-854-3
Version numérique : 8,99 €

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