Jihad de Jean-Marc Ligny aux éditions L'Atalante
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Intolérance, crimes religieux, attentats, racisme, lois liberticides, répression… Les intégrismes religieux prennent une part de plus en plus importante dans notre actualité et l’on cherche à comprendre et à surmonter cette folie. C’est le libraire de l’Atalante à Nantes qui m’a plus chaudement recommandé ce titre de Jean-Marc Ligny, déjà paru au début des années 90 en pleine guerre civile algérienne, et remis à jour. C’était un excellent conseil.
Présentation par la maison d’édition
« L’amour est une laisse de soie qui conduit l’homme soit au ciel, soit en enfer. » (Proverbe arabe)
Kabylie, début du XXIe siècle. Alors que la guerre civile fait rage, un village est attaqué, ses habitants massacrés. L’unique survivant apprend à Djamal Saadi que sa sœur a été violée et tuée par un mercenaire français nommé Max Tannart.
Infiltré dans une France déchirée entre les milices du Parti national au pouvoir et les ex-combattants de Daesh, Djamal connaîtra l’enfer, dans ce pays où la couleur de sa peau et son type ethnique suffisent à attiser la haine. Djamal n’est pas un immigré comme les autres. Il ne vient pas chercher du travail ni combattre aux côtés de la résistance. Guerrier solitaire, il se fraye un chemin sanglant afin d’accomplir son jihad personnel, qui porte un autre nom : vengeance.
Intrigue foisonnante, personnages attachants, action menée à cent à l’heure… Un thriller de politique-fiction auquel les développements récents de l’actualité donnent un saisissant parfum d’authenticité.
Mon avis
Il rejoint peu ou prou celui énoncé par la maison d’édition.
Dès les premières pages, on est plongé dans l’horreur d’une guerre civile : la folie qui frappe à l’aveugle dans un village tout ce qu’il y a de plus calme ; le sentiment d’impuissance incarné dans le personnage du berger Ali, condamné à écouter le massacre et à le regarder de loin pour pouvoir témoigner et raconter. À travers l’histoire de Djamal, on explore les liens entre politique internationale et utilisation de la religion ainsi que le rôle des « puissances étrangères » dans les conflits locaux ; on plonge dans les coulisses de la traite des êtres humains ; et on réfléchit aux mécanismes qui entraînent quelqu’un dans la violence.
L’intelligence du scénario tient à la nature même de la « croisade » de Djamal, qui repose sur une vengeance personnelle. Djamal n’est pas un fou de Dieu, il ne croit qu’en sa propre volonté et non à une entité extérieure. En ça, on le suit et on découvre avec une foule de personnages improbables mais crédibles. Les thèmes évoqués rejoignent certains de ceux de Qui a peur de la mort ?, la part de magie en moins. Ici, la colère et la vengeance personnelle sont poussées à leur paroxysme, et balaient toute mythologie.
La puissance du roman tient à sa force prophétique, qui en ferait presque un roman-documentaire, hélas. Mais c’est justement la force et l’atout de la science-fiction : prendre le réel et le tordre en une sorte de miroir déformant, afin d’en dénoncer les absurdités parfois criminelles, et ce de façon plus habile et plus poignante qu’un récit d’autofiction. On ressort sonné de cette lecture qui donne envie de creuser davantage dans ces thèmes, et d’aller découvrir les autres titres de cet auteur prolifique.
Informations complémentaires
Jihad, de Jean-Marc Ligny
Illustrateur : Raphaël Defossez
Éditions L’Atalante – diffusion CDE – distribution Sodis
http://www.l-atalante.com/catalogue/la_dentelle_du_cygne/jihad/48/953/jean-marc_ligny/detail.html
Collection : La Dentelle du cygne
ISBN13 : 9782841728060
Avril 2017
400 pages
21,00 €